Au premier hurlement
Au premier coup de patte
Au premier coup de griffe
A la première morsure
J’ai arrêté de respirer

Au deuxième hurlement
Au deuxième coup de patte
Au deuxième coup de griffe
À la deuxième morsure
J’ai tenté de fuir

Au troisième hurlement
Au troisième coup de patte
Au troisième coup de griffe
À la troisième morsure
J’ai saisi un couteau
Affuté, large et massif

Au hurlement suivant
Au coup de patte suivant
Au coup de griffe suivant
À la morsure suivante
Vaincue, je me suis tue
Silence de pierre mouillé
Silence mouillé de pleurs

Il y a eu les yeux des enfants pour voir et pleurer
Il y a eu les oreilles des enfants pour entendre et frémir
Il y a eu le cœur des enfants pour saigner et gémir

À toutes mes larmes versées citadelles
À tous mes pourquoi brisés en pièce
Que peut répondre la bête ?

À tous mes pardons extorqués, arrachés, exprimés
À tous mes « je t’aime » implorés, exigés, dénudés
Que peut répondre l’homme ?

À tous ces mots milliers de fois
Proférés, murmurés
À tous ces mots du bout des lèvres,
du bout du cœur
milliers de fois déroulés, exhibés
Que peut répondre la femme ?

Ne pas oublier pourquoi je suis partie
(Le temps parfois te joue de ces tours
À ne plus savoir où tu en es
Le temps parfois te joue de ces tours
À ne plus savoir pourquoi tu es partie)

Ne pas oublier :
le premier hurlement
le premier coup de patte
le premier coup de griffe
la première morsure

Ne pas oublier la première fois
La première fois quand tu es devenu Autre
La première fois toi devenu bête
La première fois moi devenue proie
toi devenu bête
moi devenue proie

Ne pas oublier !